C’est LE comédien éternel, bouffon et grandiose. Magnifique. 



LE DERNIER CHANT

Théâtre de l’Épée de Bois
Cartoucherie de Vincennes
Route du Champs de Manœuvre 75012 Paris 01 48 08 39 74 Jusqu’au 7 mai 2017

Du 8 au 30 Juillet 2017 Festival d’Avignon, théâtre du Nouveau Ring.
Du 24 au 25 Novembre 2017, au Théâtre de l’Imprimerie à Montpellier (34).
Le 20 mars 2017 au Théâtre le Dôme à Saumur (49)

Sont ici réunis « le chant du cygne », une courte pièce de Tchekhov, avec quelques nouvelles du même, plus des extraits de la correspondance entre l’auteur et la comédienne Olga Knipper. Leur point commun, le théâtre et le monde des comédiens et comédiennes. Enthousiasme des spectateurs après une représentation. Les souvenirs d’un souffleur qui fait son travail de soir en soir, des années durant…mais a une envie folle de monter sur scène. Un jour, n’y tenant plus, il se lance. Une jeune actrice s’interroge sur son art, après un premier spectacle.

On voit bien que ces thèmes, la scène comme reflet et refuge, l’échec d’une vie ou du moins les manques qui se font jour sur le tard, sont éminemment tchekhoviens. Jouer bien, jouer mal, telle est la question. La mythologie du comédien est elle aussi interrogée.

Le seul petit hic est qu’on apprécie surtout chez l’auteur d’ « Oncle Vania » la fameuse petite musique : ces personnages en fin de vie (la quarantaine, à l’époque) qui ne se remettent pas de n’être rien. De n’avoir rien fait. Le temps y passe à son rythme, lourd et lent, et l’on goûte spécialement ces moments suspendus. Ici, bien sûr, ce n’est pas tout à fait cela : même dans la pièce « Le chant du cygne », c’est un quasi monologue puisque le vieux comédien (Emmanuel Ray) se confie au souffleur, rôle quasiment muet. Pour les autres séquences, il s’agit de monologues d’où une impression de décousu, d’inachevé, comme si des personnages étaient venus parler chacun de sa vie, sans communiquer vraiment.

Si l’on accepte le parti pris  adopté, on passera une soirée plaisante : le décor, surprenant, apporte au spectacle une note  étrange, entre familiarité et artifice. Mise en scène soignée et éclairages « parlants ». Les comédiens sont tous très convaincants, de Mélanie Pichot, tendue et touchante à Fabien Moiny qui cultive une sorte de bonhomie qui vire parfois à la fureur désespérée. Visage fatigué, barbe en broussaille, Emmanuel Ray est parfait en cabot revenu de tout, les scènes petites et grandes, illustres ou minables, et que le silence du théâtre, un soir, affole. L’occasion pour lui de revivre ses grands rôles, de Shakespeare ou Pouchkine. C’est LE comédien éternel, bouffon et grandiose. Magnifique. 

Gérard Noël